Assurance accident invalidité – manipulation d’un contenant de cinq gallons de diesel – définition du terme « accident » au sens du contrat d’assurance
Fortin c. Humania, compagnie d’assurances inc., [2016] QCCQ 12079.
La Cour est appelée à trancher la demande de Jean-Niel Fortin (« Fortin ») quant au droit à des indemnités résultant de la police d’assurance invalidité en cas d’accident émise par Humania, compagnie d’assurances inc. (« Humania ») ainsi qu’à son droit à des dommages-intérêts compensatoires.
Le 3 octobre 2012, Fortin, dans le cadre de son travail, soulève un contenant de cinq gallons de diesel et en faisant une rotation se blesse dans le bas du dos.
Après plusieurs jours de douleurs, il consulte la docteure Lantagne qui diagnostique une entorse dorso-lombaire pour laquelle Fortin est en arrêt total de travail durant 6 jours. Durant le mois qui suit, il est limité à certaines tâches moins difficiles.
Le 30 décembre 2012, Fortin transmet une demande d’indemnité d’assurance à Humania qui refuse la prise en charge le 17 janvier 2013 considérant que la situation vécue par Fortin ne rencontre pas la définition du terme « accident », telle qu’énoncée dans le contrat d’assurance. Il n’est pas remis en cause le fait que Fortin n’a pas d’antécédent pouvant justifier son entorse dorso-lombaire.
Humania prétend que Fortin a agi dans le cadre habituel et dans l’exécution normale de ses fonctions, ce qui est exclu par la définition d’ « accident » qui prévoit que c’est un événement dû à des causes externes, violentes, soudaines, fortuites et indépendantes de la volonté de l’assuré.
La Cour doit donc déterminer si l’événement du 3 octobre 2012 est un accident et, si oui, si Fortin a droit à des dommages-intérêts compensatoires pour troubles, ennuis et inconvénients.
Après avoir rappelé que le contrat d’assurance est un contrat d’adhésion, car l’adhérent (Fortin) ne peut discuter librement des clauses essentielles de celui-ci qui est rédigé par l’assureur tel que le prévoit l’article 1379 du Code civil du Québec, la Cour fait une revue jurisprudentielle sur l’interprétation donnée au mot « accident ». En effet, il est reconnu que le contrat d’assurance doit s’interpréter de manière à respecter autant que possible les attentes raisonnables des parties.
Essentiellement, tant en doctrine qu’en jurisprudence, l’« accident » étant considéré comme ce qui n’est pas une maladie, il faut donc rechercher la cause de celui-ci. Si la cause est externe, l’événement peut alors être qualifié d’« accident ».
Humania prétend qu’étant donné que le soulèvement d’objet faisait partie des tâches de Fortin, ce dernier a agi dans le cours habituel de ses fonctions et qu’alors il n’y a pas de cause externe, car l’événement n’est ni soudain ni imprévisible.
La Cour ne partage pas l’opinion d’Humania à cet égard puisque la charge soulevée par Fortin est supérieure à celle faisant partie de ses tâches habituelles et conclut que l’événement du 3 octobre 2012 constitue un « accident » au sens de la police pour les raisons suivantes :
- Présence d’une cause externe non intentionnelle, ce n’est pas une maladie;
- La torsion a occasionné un résultat violent, imprévu et inattendu;
- Absence d’antécédent;
- Aucune exclusion du contrat d’assurance ne s’applique.
Quant à la demande de dommages-intérêts compensatoires, la Cour énonce qu’Humania a une obligation contractuelle. Or, les dommages compensatoires résulteraient d’un dommage extracontractuel, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, car Humania n’a pas abusé de son droit et pouvait légitimement refuser l’application du contrat eu égard à l’interprétation des termes du contrat.
En conclusion, la Cour accueille en partie la demande de Fortin, soit à l’égard des indemnités résultant de son invalidité, et rejette la demande de dommages-intérêts compensatoires.