Gare aux faux avis! – Injonction provisoire – Droit à la sauvegarde de sa réputation – Liberté d’expression – Quel est le remède applicable lorsque des avis de faux clients se retrouvent sur la page d’une entreprise ?
Dam c. Ho, 2019 QCCS 4653.
Jugement sur la demande de Tram-Anh Dam et Acupuncture Yi King (ci-après : « demanderesses ») en injonction provisoire à l’encontre de Caroline Quy Chau Ho, Kevin Sidhu et Sepher Farahmand (ci-après : « défendeurs ») et des mises en cause Google Canada Corporation et Google LLC (ci-après : « Google »).
Les faits
Les demanderesses exploitent un commerce d’acupuncture à Montréal. Madame Tram-Anh Dam et madame Caroline Quy Chau Ho ont un différend d’origine purement personnel. Dans le cadre d’une conversation entre celles-ci, madame Ho informe madame Dam qu’elle inscrira de faux avis sur la page Google de son commerce.
Quelques jours plus tard, les demanderesses constatent que de faux avis se trouvent sur leur page Google. En effet, des personnes n’ayant jamais requis les services des demanderesses inscrivent de faux renseignements à propos des demanderesses sur la page Google de l’entreprise. Ces avis sont visibles pour toute personne effectuant une recherche à propos des demanderesses.
Constatant qu’elle est victime d’une campagne de salissage, la demanderesse s’adresse aux mises en cause afin de tenter de faire retirer les avis. Malheureusement, les mises en cause indiquent aux demanderesses qu’il n’est pas possible de retirer les avis à ce stade. Les demanderesses déposent donc une demande en injonction provisoire, interlocutoire et permanente à l’encontre des défendeurs et des mises en cause afin de faire retirer les avis mensongers et afin de se faire indemniser pour le préjudice causé par ces mêmes écrits frauduleux.
Analyse et décision de la Cour
À l’étape de l’injonction provisoire, le tribunal en vient à la conclusion que les demanderesses ont présenté une preuve convaincante à l’effet que madame Ho ait orchestré une campagne de désinformation sur le page Google des demanderesses. De plus, il appert que tous les défendeurs ont participé au stratagème visant la rédaction d’évaluations négatives à propos des demanderesses.
Le tribunal en profite pour indiquer que le droit des demanderesses au respect de leur réputation, prévu à l’article 4 de la Charte des droits et libertés de la personne doit prévaloir sur la liberté d’expression des défendeurs puisque la liberté d’expression n’a pas pour effet de protéger les auteurs de propos qu’ils savent faux.
De plus, le juge Marc St-Pierre indique que la mise en cause Google LLC a le devoir de réagir et de corriger la situation ayant été portée à son attention lorsque des preuves sérieuses de manipulation de la page internet d’un membre occasionne à ce dernier un préjudice sérieux.
Considérant que les demanderesses ont fait la démonstration d’une apparence de droit à l’encontre des défendeurs et de Google LLC et que la balance des inconvénients milite en faveur des demanderesses, le tribunal accorde l’injonction provisoire recherchée par les demanderesses.
Le tribunal ordonne donc aux défendeurs et à quiconque, de ne pas diffuser, publier ou reproduire des propos diffamatoires à propos des demanderesses et ordonne à Google LLC de retirer les avis mensongers de la page des demanderesses.