Assurance prêt – douleur aux pieds – définition du terme « invalidité totale » au sens du contrat d’assurance
Bourdeau c. Desjardins Sécurité Financière , [2016] QCCQ 10602.
La Cour doit déterminer si Michel Bourdeau (« Bourdeau ») peut être déclaré totalement invalide au sens de la couverture d’assurance émise par Desjardins Sécurité Financière (« Desjardins ») et, pour ce faire, s’il est capable de travailler de façon normale en quantité, qualité et durée.
Bourdeau est porteur depuis 2007 d’un diabète de type II, avec atteinte polyneuropathique affectant essentiellement ses membres inférieurs. Ses troubles se manifestent par de violentes douleurs aux pieds qui l’empêchent d’avoir une vie normale tant au niveau de ses activités que de son travail.
Bourdeau étant bénéficiaire d’une assurance prêt auprès de Desjardins, il réclame des indemnités relativement à son invalidité pour une période de 41 mois, soit 23 698 $ qu’il réduit à 15 000 $ afin que sa demande soit entendue par la division des petites créances de la Cour du Québec.
Desjardins soutient que l’invalidité de Bourdeau n’est que partielle et intermittente et, en conséquence, qu’elle ne correspond pas à la définition de la police permettant à Bourdeau de recevoir des indemnités puisque ce dernier n’est pas incapable d’exercer chacune des activités normales d’une personne de son âge. Desjardins considère qu’il faut donner une interprétation littérale à cette clause.
Tout d’abord, la Cour a examiné de nombreuses preuves médicales à l’appui des prétentions de chaque partie. Or, chaque professionnel a pu constater que la condition de Bourdeau est soit limitée, invalidante ou incapacitante. En effet, ils sont tous d’accord pour dire que celui-ci est restreint dans ses activités.
Ensuite, le juge rappelle qu’un contrat d’assurance est un contrat d’adhésion au sens de l’article 1379 du Code civil du Québec puisque les conditions essentielles du contrat sont imposées par l’assureur sans possibilité pour l’assuré de les discuter. Or, en cas de doute sur l’interprétation d’une clause, il faut appliquer la règle énoncée à l’article 1432 du Code civil du Québec prévoyant qu’il faut l’interpréter en faveur de l’adhérent.
De plus, le juge mentionne que la jurisprudence a établi que les dispositions d’assurance doivent recevoir une interprétation large quant à sa couverture et restrictive quant à ses exclusions.
Enfin, il faut appliquer la règle des attentes raisonnables de l’assuré lorsqu’il y a une ambiguïté dans une clause.
À la lueur des principes énoncés, la Cour analyse des décisions aux termes desquelles il a été nécessaire d’interpréter des termes équivalents à « l’exercice de chacune des activités normales d’une personne du même âge ». Or, on peut en déduire qu’il serait contraire à l’esprit de la protection d’assurance de conclure que ce n’est que dans les cas où un assuré ne pourrait absolument plus rien faire qu’il aurait droit à des indemnités.
La Cour conclut donc qu’il faut en comprendre que les activités visées doivent pouvoir être faites de façon normale en quantité, en qualité et en durée.
En conséquence, le fait que Bourdeau ne puisse exercer que certaines activités, sur une courte période et dont la réalisation affecte son état, permet à la Cour de juger que celui-ci doit bénéficier de la couverture d’assurance invalidité totale.
La Cour accueille la demande de Bourdeau et lui accorde la somme réclamée de 15 000 $.