Congédiement – Demandes de documents – Privilège relatif au litige et privilège du secret professionnel
Amato c. Bofiq inc., [2017] QCCQ 4226
Dans le cadre d’un recours visant à obtenir le paiement d’une indemnité et d’autres dommages à la suite de son congédiement, M. Gian Carlo Amato (« Amato ») demande la communication de notes personnelles prises lors de l’enquête de son employeur, d’échanges courriel entre son employeur et son avocate interne et l’avertissement transmis à un autre employé lors des évènements ayant mené au congédiement d’Amato.
Les faits
Le 28 janvier 2016, Amato est congédié par Bofiq inc. (« Bofiq »). Amato réclame à Bofiq le paiement d’une indemnité tenant lieu de congé et d’autres dommages.
Lors d’un interrogatoire préalable, l’avocate de Bofiq soulève trois objections au niveau de la communication de la preuve.
La première objection porte sur la communication de notes prises par des employés de Bofiq portant sur le congédiement d’Amato. L’avocate de Bofiq invoque le privilège relatif au litige pour s’opposer à cette communication.
La deuxième objection porte sur la communication d’un échange de courriel entre la direction et la procureure interne de Bofiq. L’avocate de Bofiq invoque le secret professionnel pour s’opposer à cette communication.
La dernière objection porte sur la communication d’un avertissement remis à un autre employé de Bofiq lors des évènements ayant mené au congédiement d’Amato. L’avocate de Bofiq soulève la pertinence pour s’opposer à la communication.
Analyse et décision de la Cour
La Cour débute en rappelant certains principes guidant le déroulement des interrogatoires préalables dans le Code de procédure civile. L’article 228 C.p.c. prévoit que seules les objections portant sur un sujet pour lequel une personne ne pourrait pas être contrainte de répondre, sur les droits fondamentaux ou les questions soulevant un intérêt légitime peuvent être débattues en gestion d’instance. La Cour rappelle qu’à défaut d’être dans l’une de ces catégories, le témoin est tenu de répondre et l’objection sera débattue lors de l’instruction.
En ce qui a trait aux notes personnelles des employés de Bofiq, la Cour rappelle les normes entourant le privilège relatif au litige. Le privilège relatif au litige est un privilège générique qui vise à maintenir l’intégrité du processus contradictoire. Pour pouvoir s’appliquer, le document devra avoir été préparé pour un litige existant ou anticipé. De plus, le document devra avoir été confectionné avec comme objectif principal l’utilisation pour les fins d’un litige. En l’espèce, la Cour conclut que les notes personnelles des employés ont été consignées afin de servir d’aide-mémoire pour un témoignage éventuel et pour renseigner l’avocate interne sur les faits du litige. Donc, elles sont protégées par le privilège relatif au litige.
En ce qui a trait à l’objection portant sur le secret professionnel, la Cour rappelle que le fait qu’il s’agisse d’une avocate interne ne change rien aux critères. Pour s’appliquer, la Cour devra déterminer s’il s’agit d’une communication entre un procureur et son client, que la consultation a eu lieu dans le cadre de sa profession et qu’il y avait l’intention de conserver la confidentialité des informations. En l’espèce, la Cour, après avoir pris connaissance de façon confidentielle des courriels en cause, conclut que les critères sont satisfaits et refuse la communication.
Finalement, la Cour souligne que l’objection fondée sur la pertinence de la communication de l’avertissement n’aurait pas dû faire l’objet d’un avis de gestion. Au contraire, cette objection aurait dû être débattue lors de l’instruction au fond. En l’espèce, la Cour statue que puisque l’avertissement émane du même incident et qu’un témoin de Bofiq l’a mentionné, Amato est en droit d’en obtenir la communication.