Lorsque la forme l’emporte sur le fond ! – Loi sur les cités et villes – Demande en irrecevabilité – Demande en rejet – Avis écrit – L’avis prévu à la Loi sur les cités et villes doit-il obligatoirement être écrit ?
Thanopoulos c. Ville de Montréal, 2019 QCCS 2156
Dans la présente affaire, le tribunal est saisi d’une demande en irrecevabilité et en rejet pour abus de procédure de la Ville de Montréal (ci-après : « la défenderesse ») à l’encontre de l’action intentée par John Thanopoulos (ci-après : « le demandeur »). La principale question en litige est de savoir si le moyen d’irrecevabilité soulevé par la défenderesse est bien fondé.
Les faits
Le demandeur est propriétaire d’un immeuble situé à Montréal. Le 30 octobre 2017, ce dernier remarque que des jets d’eau jaillissent de son jardin ainsi que de son entrée de stationnement. Il capte alors la scène en vidéo et se rend immédiatement à la mairie de son arrondissement. Des représentants de la défenderesse se rendent alors chez le demandeur et l’informent que la défenderesse exécutera des travaux correctifs le plus rapidement possible.
Par la suite, le demandeur effectue un suivi régulier auprès de la défenderesse. Toutefois, ces démarches ne portent pas fruit et, le 28 février 2018, le demandeur envoie une mise en demeure à la défenderesse l’enjoignant de corriger la situation. Devant l’inaction de la défenderesse, le demandeur institue, le 27 avril 2018, un recours dans lequel il réclame 183 082,26$ à la défenderesse.
La défenderesse soutient ne jamais avoir reçu l’avis prescrit selon le deuxième paragraphe de l’article 585 de la Loi sur les cités et villes lequel doit être envoyé dans les 15 jours suivants l’événement en question. La défenderesse demande donc que le recours soit déclaré irrecevable.
Analyse et décision de la Cour
L’article 585(2) de la Loi sur les cités et villes prévoit que dans le cadre d’une réclamation pour dommages à une propriété immobilière, un avis doit être envoyé à la municipalité faute de quoi cette dernière n’est pas tenue de payer des dommages-intérêts. Cet avis doit également comprendre des indications précises.
Le tribunal rappelle qu’une demande en irrecevabilité ne sera accueillie que lorsque la situation juridique ne présente aucune ambiguïté et que lorsque la prétention est à l’effet qu’il y a absence de fondement juridique, le tribunal d’instance doit disposer de cet argument.
D’entrée de jeu, le demandeur admet qu’il n’a pas envoyé d’avis écrit à la défenderesse afin de l’informer du problème et de son intention d’intenter une poursuite. Le demandeur soutient qu’il a bel et bien dénoncé la situation problématique à la défenderesse en portant à sa connaissance la vidéo qu’il avait enregistrée. Ce dernier mentionne également que la défenderesse a renoncé à recevoir l’avis prévu à la Loi sur les cités et villes en s’engageant à effectuer les réparations.
L’honorable juge Guylène Beaugé rappelle que le but de l’avis écrit prévu à la Loi sur les cités et villes est d’informer la municipalité et lui permettre de faire les enquêtes nécessaires quant à la situation problématique. Cela permet donc de protéger les municipalités contre les réclamations tardives et abusives.
La cour en vient à la conclusion que bien que le but puisse sembler avoir été atteint, ce n’est pas le cas puisqu’il ne suffit pas de simplement informer la municipalité de la survenance d’un sinistre. Il faut également transmettre un avis écrit, exprimer son intention de poursuivre la municipalité, fournir les détails de sa réclamation et préciser son adresse.
Le tribunal accueille la demande en irrecevabilité de la défenderesse.