Présence de particules noires dans l’eau d’une résidence – responsabilité de la Ville de Québec pour les dommages moraux et matériels
Saint-Hilaire c. Québec (Ville de), [2016] QCCQ 4510.
Le tribunal est saisi d’une demande en responsabilité à l’encontre de la Ville de Québec (« Ville ») intentée par madame Saint-Hilaire et monsieur Gonthier suite à la présence massive de particules noires dans l’eau de leur résidence.
À partir de février 2012, Mme Saint-Hilaire et M. Gonthier constatent la présence de particules noires dans l’eau de leur résidence. Entre 2012 et 2015, ces particules sont plus ou moins présentes. Après diverses interventions, tant par la Ville que par des professionnels, il s’avère alors que celles-ci résulteraient non pas d’un problème à leur résidence, mais dans le système d’aqueduc.
Le régime de responsabilité applicable à la Ville est le régime général de l’article 1457 C.c.Q. exigeant l’établissement d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité. Par ailleurs, le droit à l’eau potable et à l’assainissement est généralement reconnu comme un droit fondamental tel qu’énoncé à l’article 46.1 de la Charte des droits et libertés de la personne et ce droit est inclus dans divers règlements. Quoique de l’analyse de la preuve faite par le tribunal, la Ville respecte les normes établies, le régime de responsabilité du fait des biens prévu à l’article 1465 C.c.Q. trouve application en l’espèce. En effet, cet article prévoit une présomption de faute qui peut être renversée par une simple preuve de l’absence de faute. Or, la Ville n’a pas démontré avoir pris des mesures raisonnables pour s’assurer de la qualité de ses canalisations et sera donc tenue à la réparation du préjudice.
Également, le tribunal analyse l’application du régime de responsabilité pour troubles anormaux du voisinage prévu par l’article 976 C.c.Q. qui est aussi un régime de responsabilité non pas fondé sur la faute, mais sur le caractère anormal des inconvénients subis. Durant l’audience, un échantillon d’eau de la résidence des demandeurs a été présenté au tribunal. Ce dernier a pu constater que même si, après analyse, l’eau a été reconnu potable, celle-ci n’en est pas moins « non-consommable » pour l’usage d’un ménage compte tenu de l’importance des particules. D’ailleurs, un technicien de la Ville avait reconnu que la présence de celles-ci rendait l’usage de l’eau très désagréable. Par conséquent, le tribunal conclut que les inconvénients subis par Mme Saint-Hilaire et M. Gonthier excèdent les limites raisonnables qu’un propriétaire peut accepter et que la Ville est donc responsable.
Quant au préjudice matériel, celui-ci sera indemnisé pour les sommes réclamées durant les 6 mois précédents la demande comme le prévoit le régime de prescription de l’article 585(5) de la Loi sur les cités et villes, mais le préjudice moral n’étant pas inclus, le tribunal peut l’évaluer suivant la prescription de 3 ans de l’article 2925 C.c.Q.
En conséquence, le tribunal accueille en partie la demande en dommages de Mme Saint-Hilaire et M. Gonthier et condamne la Ville à 5 000 $ de dommages moraux et à 699,17 $ pour les dommages matériels résultant de l’installation du système de filtrage de l’eau.