Rapport d’expert – Renseignements confidentiels – Ordonnance de confidentialité de type « for lawyer’s eyes only »
PR Entretien d’édifices inc. c. Le Comité paritaire de l’entretien d’édifices publics, région de Montréal, [2017] QCCS 157
P.R. Entretien d’édifices inc. (« P.R. Entretien ») demande une ordonnance de confidentialité de type « for lawyer’s eyes only » afin de protéger des renseignements confidentiels contenus dans un rapport d’expert.
Faits pertinents
P.R. Entretien poursuit Le Comité paritaire de l’entretien d’édifices publics, région de Montréal (« Comité paritaire ») en dommages-intérêts suite à un refus d’émettre un certificat de conformité. Ce dernier était nécessaire pour obtenir des contrats par soumission.
La détermination des dommages se fera à partir d’une expertise préparée à la demande de P.R. Entretien. Or, l’expertise contient des informations confidentielles concernant :
- Les marges bénéficiaires ;
- La structure opérationnelle ;
- La structure de la main-d’œuvre ;
- Les détails sur les principaux clients ;
- Le contrôle interne.
De nombreux compétiteurs de P.R. Entretien siègent au conseil d’administration du Comité paritaire. Il existe donc une crainte que l’information confidentielle soit utilisée par les compétiteurs au détriment de P.R. Entretien.
Pour sa part, le Comité paritaire invoque qu’il doit connaître les détails de l’expertise pour orienter adéquatement sa défense.
Analyse et décision de la Cour
La Cour débute en rappelant qu’elle a le pouvoir de prendre toutes les mesures appropriées afin d’éviter la transmission indue d’informations confidentielles pouvant nuire à une partie. Elle cite notamment la Cour Suprême dans Glegg c. Smith & Nephew inc. qui reconnait le pouvoir d’interdire aux avocats de communiquer des documents à la partie qu’ils représentent. Une telle ordonnance doit néanmoins sauvegarder le droit à une défense pleine et entière.
Chaque cas devra être analysé comme un cas d’espèce. Ici, la Cour favorise la confidentialité en raison du conflit d’intérêts potentiel des membres du Comité paritaire. Les secrets d’entreprise contenus dans le rapport pourraient être utilisés par les compétiteurs de P.R. Entretien, d’autant plus qu’ils œuvrent dans un secteur d’activité très spécialisé.
Dans les circonstances, une ordonnance de type « for lawyer’s eyes only » est appropriée. L’information confidentielle dans le rapport n’est pas nécessaire pour assurer une défense pleine et entière. Dans l’éventualité où l’expert du Comité paritaire aurait besoin d’information supplémentaire pour compléter son propre rapport, une ordonnance de divulgation pourrait alors être rendue.
Bien que l’ordonnance de confidentialité soit un accroc à la publicité des débats et à la liberté d’expression, elle est justifiée par les circonstances spéciales mettant en danger l’intérêt commercial de P.R. Entretien. La balance des inconvénients est en faveur de cette dernière.
La demande de confidentialité de type « for lawyer’s eyes only » est donc accueillie.