Sinistre imputable aux actes criminels ou faute intentionnelle d’un assuré : Où en sommes-nous ?
Mise-à-jour
Le 2 avril 2013, nous faisions état dans une publication d’un jugement de la Cour d’appel rendu le 16 janvier 2013, dans l’affaire Place Biermans Inc. et al. c. C.D. et Axa Assurances Inc.1
Le 23 mai 2013, la Cour Suprême du Canada a rejeté la requête pour autorisation de pourvoi.
La Cour d’appel a rendu, le 16 janvier 2013, un jugement dans l’affaire Place Biermans Inc. et al. c. C.D. et Axa Assurances Inc. 1 où elle a clairement indiqué que la prévisibilité de l’incendie d’un bâtiment voisin peut entraîner l’application de l’exclusion pour faute intentionnelle d’un assuré.
Rappel historique :
Cet arrêt s’inscrit dans la foulée de deux décisions rendues en 2010 qui ont fait l’objet d’un appel, dont celui cité plus haut. Dans l’affaire ACE-INA Insurance Co. et al. c. M.L. et al. 2,jugement rendu le 11 août 2010, le tribunal était saisi d’une action de compagnies d’assurances pour récupérer les indemnités versées à leur assuré à la suite d’un incendie du garage abritant des équipements alors que des adolescents avaient mis le feu à des sections de clôtures à neige entreposées à côté du garage, feu qui s’est propagé.
Le juge de première instance avait dès lors conclu, à la lumière de la preuve, que le plaidoyer de culpabilité enregistré par chaque adolescent au tribunal de la Jeunesse constituait un aveu extrajudiciaire valable et qu’il s’agissait dès lors de la commission d’un acte criminel donnant ouverture à l’application de l’exclusion relative aux dommages imputables à des actes criminels.
Le 29 mars 2012 3 , la Cour d’appel confirmait le jugement de première instance indiquant que les adolescents avaient commis un crime d’incendie et que cela suffisait pour établir le crime. Voici comment la Cour résume sa position :
« [2] À ce sujet et avec égards pour le juge de première instance, on ne peut considérer lamens rea d’insouciance au moment où le feu dégénère, se propage à l’immeuble et que monsieur X et son compagnon s’enfuient. C’est au moment où le geste est posé, c’est-à-dire lorsque le feu est allumé, qu’il faut se placer. Les dommages au garage sont donc clairement « imputables » à l’acte criminel.
[3] Pour conclure à l’existence d’un crime d’incendie criminel, le juge de première instance n’avait pas besoin de recourir au plaidoyer de culpabilité de monsieur X devant le Tribunal pour adolescents. D’ailleurs, il ajoute cet élément après avoir conclu que monsieur X avait commis le crime. Cela rend théorique l’argument des appelantes que cet aveu de culpabilité n’était pas admissible en preuve. »
Parallèlement, un deuxième jugement fut rendu le 17 septembre 2010 en Cour Supérieure, dans l’affaire Place Biermans Inc. 4, par l’honorable juge Danielle Richer. Dans ce dossier, un adolescent a volontairement mis le feu à un cabanon situé à proximité d’un immeuble et le feu s’est dès lors propagé pour endommager lourdement le centre commercial.
Bien que le jeune ait plaidé coupable au crime d’incendie et qu’il prétendait ne pas avoir eu l’intention de mettre le feu au Centre commercial Place Biermans, le juge de première instance en est venu à la conclusion que la clause d’exclusion dans la police d’assurance de Axa résultant d’un acte criminel s’appliquait en l’espèce ou, à défaut, qu’il s’agissait d’un acte intentionnel.
Tel que mentionné ci-haut, la Cour d’appel est venue confirmer que l’exclusion de la couverture des dommages imputables à la commission d’un acte criminel et ses conséquences trouvait application et elle se réfère à l’arrêt ACE-INA Insurance Compagny c. SSQ Assurances Générales.
Mais il y a plus car, au-delà de cette conclusion, la Cour souligne également que la preuve en première instance avait établi que l’adolescent avait réalisé ou ne pouvait ignorer la possibilité de la propagation de l’incendie au Centre commercial Place Biermans, ce qui enclenchait également l’exclusion pour faute intentionnelle.