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CÔTÉ COUR

Sous-traitant dans l’eau chaude! — Obligation de défendre de l’assureur — Clause d’exclusion relative aux « travaux de l’assuré » — Les dommages réclamés sont-ils couverts ou découlent-ils de malfaçons dans les « travaux de l’assuré »?

Ville de Québec c. Socomec Industriel inc. et Zurich et Intact c. Réfrabec inc. et Industries Samson inc. et Lloyd’s, 2018 QCCS 3878

Industriel Samson inc. (ci-après « Samson »), partie demanderesse en arrière-garantie, présente une demande de type Wellington visant à forcer son assureur, Les Souscripteurs du Lloyd’s (ci-après : « Lloyd’s »), à prendre fait et cause et à assumer sa défense dans le litige l’opposant à Zurich Compagnie d’assurances (ci-après : « Zurich ») et Intact Compagnie d’assurance (ci-après : « Intact »). Afin de trancher le présent litige, il s’agit de déterminer s’il y a couverture ou si les dommages réclamés sont visés par la clause d’exclusion visant « les travaux de l’assuré » tel que le prétend Lloyd’s.

Les faits

En août 2014, la ville de Québec (ci-après : « la Ville ») octroie à Socomec Industriel inc. (ci-après : « Socomec »), entrepreneur spécialisé en tuyauterie mécanique, un contrat de métallisation par pulvérisation thermique de la chambre de combustion du four 1 de l’incinérateur de Québec. Dans le cadre d’exécution de ce contrat, Socomec fait appel aux services de Réfrabec inc. (ci-après : « Réfrabec »), sous-traitant, aux fins de préparation des surfaces du four 1. Les tubes du four 1 sont endommagés lors de l’exécution des travaux de Réfrabec. Socomec retient alors les services de Samson dont le mandat est de réparer lesdits tubes. Les travaux correctifs terminés, la Régie du bâtiment du Québec (ci-après « RBQ ») refuse les travaux exécutés Socomec en raison de non-conformité aux normes de l’industrie et exige un plan d’action des travaux correctifs requis à la remise en marche du four 1 de l’incinérateur.

Après plusieurs tentatives de la Ville afin d’obtenir le plan d’action, cette dernière intente un recours contre Socomec, Zurich à titre d’assureur responsabilité et Intact à titre de caution. Ces derniers appellent en garantie Réfrabec et Samson, invoquant leur responsabilité relative aux travaux en question, afin que celles-ci soient condamnées à les indemniser de toute condamnation éventuelle dans l’instance principale.

À son tour, Samson appelle en garantie Lloyd’s, son assureur responsabilité civile pour la réalisation des travaux. Lloyd’s refuse de prendre fait et cause et d’assurer la défense de Samson sous prétexte que la réclamation liée aux travaux correctifs est exclue de la couverture d’assurance. Selon elle, toute réclamation éventuelle liée à la situation en cause serait le résultat de dommages causés par les « travaux de l’assuré », qui eux font l’objet d’une clause d’exclusion à la Police d’assurance (ci-après : « la Police »). Samson allègue plutôt que les dommages allégués se limitent à ceux causés par Réfrabec, soit ceux qu’elle avait pour mandat de corriger. Face au refus de l’assureur, Samson saisit le tribunal de la présente demande.

Analyse et décision de la Cour

Avant de procéder à l’analyse des clauses d’exclusion, le tribunal détermine tout d’abord s’il y a apparence de couverture de la réclamation principale. En effet, dans le cadre de demande de type Wellington, le rôle du juge se limite à vérifier s’il existe une possibilité que la réclamation relève de la Police en faisant examen de la couverture offerte. En l’espèce, une réclamation est couverte si elle vise des « dommages matériels » résultant d’un « sinistre ». Selon Lloyd’s la réclamation ne serait pas couverte, en l’absence d’allégation selon laquelle Samson aurait endommagé les tubes. La réclamation pour le coût des travaux correctifs viserait seulement la réparation des travaux défectueux de l’assurée. Elle ajoute que les seuls « dommages matériels » seraient ceux causés par le fait de Réfrabec et qu’il n’y a tout simplement pas couverture. Le tribunal ne retient pas cette position. Bien qu’il soit exact que les travaux de réparation de Samson eurent été nécessaires suite à l’œuvre de Réfrabec, demeure la possibilité que les tubes aient étés endommagés davantage après le passage de Samson. Ceci constituerait un « dommage matériel » visé par la Police.

Ensuite, ces « dommages matériels » doivent être le résultat d’un sinistre au sens de la Police. Lloyd’s prétend que la non-conformité des travaux de Samson aux normes de la RBQ ne constitue pas un « sinistre ». Le tribunal désapprouve. Selon lui, il existe une possibilité que les sommes réclamées au niveau des coûts correctifs surpassent le coût des travaux requis à la correction de l’exécution des travaux de réparation de Samson dits non conformes aux normes applicables. En l’absence d’allégué selon lequel Samson aurait agi délibérément pour causer un dommage, la thèse du « dommage matériel » causé par un « sinistre » ne peut être exclue. Le tribunal estime donc que la réclamation est couverte et passe, subséquemment, à l’examen de l’exclusion relative aux « travaux de l’assuré ».

Dans le contexte de l’obligation de défendre de l’assureur, le fardeau en matière d’exclusion est lourd. En effet, pour se prévaloir d’une telle clause, l’assureur doit démontrer que l’exclusion est « sans équivoque » (Aldo Group inc. c. Chubb Insurance Company of Canada, 2016 QCCA 554) alors que l’assurée n’a qu’à soulever une simple possibilité que les dommages réclamés soient couverts. En l’espèce, il revenait à Lloyd’s de démontrer que ce chef de réclamation ne visait qu’à réparer les malfaçons dans le travail de l’assurée, ce à quoi elle a failli. Le tribunal conclut qu’à ce stade de l’analyse, rien au dossier ne permet d’affirmer que la destruction des tubes soit le résultat du travail défectueux de Samson ni que la réclamation pour le coût correctif des travaux ne vise qu’à reprendre le travail défectueux de Samson. L’exclusion invoquée par Lloyd’s est donc inapplicable.

La demande est accueillie. Lloyd’s a l’obligation d’assumer la défense de Samson.

14 Nov, 18

 

 

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